Le cancer de l'endomètre a classiquement la réputation d'être un "bon"cancer. En fait, si son évolution est le plus souvent lente, son traitement est souvent rendu difficile par le terrain et l'âge des patientes touchées.
Le cancer de l’endomètre est le troisième cancer chez la femme après celui du sein et de l’intestin. À l’échelle mondiale, il s’agit du septième cancer par ordre de fréquence et de la septième cause de décès par cancer chez la femme. L’augmentation de l’incidence est liée à celle de l’obésité et de l’inactivité.
Le cancer de l’endomètre est un cancer de la femme ménopausée (75-80 % des cas). L’âge médian est 61 ans. Cinq pour cent des femmes ont moins de 40 ans.
Cancer de la femme ménopausée :
L'endomètre de la femme en période d'activité génitale s'élimine tous les mois sous forme de règles : il n'a donc pas le temps de se cancériser.
En préménopause, Sous l'effet du déséquilibre hormonal dû au vieillissement de l'ovaire, les menstruations vont se dérégler avec des ménométrorragies parfois très abondantes correspondant à une imprégnation hormonale anarchique de l'endomètre .
La disparition des ovulations modifie les paramètres du cycle hormonal normal :
- disparition de la sécrétion de progestérone
- persistance de la sécrétion oestrogénique
- avec pour résultat une hyper-oestrogénie relative qui va entraîner une augmentation du volume et de l'épaisseur de l'endomètre, sorte d'histoire naturelle du cancer : Hypertrophie endométriale qui peut évoluer si elle persiste vers une hyperplasie de l'endomètre, qui à son tour, peut devenir un carcinome endométrial.
Pathologie:
Les glandes endométriales et le stroma sont à l’origine respectivement des adénocarcinomes et des sarcomes.
80% des cancers endométriaux sont du type endométrioïde, glandulaire ou adénocarcinomes.
Profils favorisants:
- Géographie: L’incidence du cancer de l’endomètre est plus élevée en Amérique du Nord et en Europe qu’en Asie (sept fois plus élevée aux États-Unis qu’en Chine). Chez les femmes asiatiques qui émigrent aux États-Unis, l’incidence rejoint celle des indigènes,
soulignant l’importance de l’environnement. Aux États-Unis, la femme blanche est deux fois plus souvent atteinte que la femme noire.
Ce cancer est rare dans les pays en développement car les facteurs de risque n’y sont pas rencontrés, mais la mortalité spécifique est élevée.
- Obésité (consommation excessive des graisses) du fait de la conversion des androgènes en estrogènes dans le tissu adipeux,
- OPK (ovaires micropolykystiques) du fait des anovulations fréquentes.
- Diabète, Hypertension arterielle.
- Tous facteurs favorisant une hyperoestrogénie, comme des cycles anovulatoires.
- THS (traitement hormonal de la ménopause) mal équilibré avec estrogènes seuls.
- Grande multiparité ou au contraire nulliparité .
- Ménopause tardive, par exposition plus longue à des cycles anovulatoires et à l’hyperoestrogénie qui en découle.
- Par opposition grâce à l’hypo-oestrogénie induite, l’allaitement est un facteur de protection.
- les hyperplasies atypiques de l’endomètre sont des lésions précancéreuses .
- les polypes et les hyperplasies simples sont plutôt des lésions favorisantes, justifiant un suivi rapproché.
Symptomes:
Il s’agit de femmes ménopausées dans 80% des cas. Dans 90 % des cas, les patientes se plaignent de pertes vaginales et dans 80 %, le signe d’appel est une hémorragie génitale (metrorragies post-ménopausiques); 9 à 14 % des femmes ménopausées souffrant d’un épisode de métrorragies ont un cancer de l’endomètre.
La probabilité de cancer augmente avec l’âge (9 % à 70 ans contre 60 % à 90 ans) et la présence de facteurs de risque.
L’âge est le facteur de risque indépendant le plus puissant.
Dans 20% des cas, les patientes ne sont pas ménopausées, et dans ces cas, le diagnostic est plus difficile, car les metrorragies en période périménopausique sont souvent dues à des anomalies de l’ovulation, responsables d’hémorragies fonctionnelles. Les ménorragies témoignent souvent d’une pathologie utérine bénigne.
Les risques de cancer sont de 42% s’il y’a une hyperplasie atypique.
Evolution:
A/ Lésion initiale
Le cancer de l’endomètre débute souvent au niveau de la face postérieure de l’utérus, du fond utérin ou au niveau d’une corne. C’est un adénocarcinome.
B/ Extension utérine
- D’une part en surface, sur l’endomètre, atteignant progressivement toute la cavité utérine, puis l’isthme et le canal cervical. Il atteint d’autant plus vite l’isthme et le col que sa localisation initiale en est proche.
- D’autre part en profondeur dans le myomètre.
C/ Extension en dehors de l’utérus
- Au vagin en premier.
- Au reste du pelvis : uretères, vessie et rectum.
- Aux ganglions lymphatiques pelviens : ils sont tardivement envahis, sauf quand l’isthme est touché, l’extension lymphatique devenant celle d’un cancer du col utérin.
- À distance, les métastases sont relativement peu fréquentes et tardives (foie, poumons, os).
Pronostic:
1. Classification FIGO (1989)
Stade 0 : cancer in situ de l’endomètre.
Stade I : cancer limité au corps de l’utérus.
- IA : limité à l’endomètre.
- IB : envahi moins de la moitié de l’épaisseur du myomètre.
- IC : envahi plus de la moitié de l’épaisseur du myomètre.
Stade II : cancer étendu au col.
Stade III : extension en dehors de l’utérus dans le petit bassin ou cytologie péritonéale positive.
Stade IV : envahissement de la muqueuse de la vessie ou du rectum ou métastases en dehors du pelvis.
Envahissement du myometre et col Envahissement des organes de voisinage
2. Classification FIGO (1989)
3. Degré de différenciation de la tumeur
Il est corrélé au pronostic (grade histopronostique) :
- G1 : tumeur bien différenciée, cas le plus fréquent.
- G2 : tumeur moyennement différenciée.
- G3 : tumeur indifférenciée.
4 - Type histologique
Deux formes péjoratives :
- le carcinome papillaire séreux (qui doit être traité comme une tumeur de l’ovaire),
- l’adénocarcinome à cellules claires (pronostic très péjoratif).
5 - Envahissement du myomètre
Il s’agit d’un facteur primordial. On parle d’envahissement inférieur à 50 %, supérieur à 50 % et dépassant la séreuse. La survie à 5 ans et le pourcentage de récidives sont étroitement corrélés à l’envahissement du myomètre.
6 - Envahissement ganglionnaire:
Il faut souligner queL’envahissement ganglionnaire pelvien et lombo-aortique est étroitement corrélé au stade, au degré de différenciation et au degré de pénétration dans le myomètre et transforme un stade I en stade IIIc.
Ces 3 derniers facteurs sont étroitement corrélés entre eux.
7 - Cytologie péritonéale positive:
8- Autres facteurs:
- Taille tumorale,
- Index de prolifération par cytométrie de flux (ploïdie, phase S, récepteurs hormonaux, surexpression des oncogènes (HER-2-NEU).
9 - Bilan d’extension
- Examen clinique général avec exploration des différentes aires ganglionnaires.
- Touchers pelviens pour apprécier l’extension aux paramètres et au reste du petit bassin.
- Une cystoscopie et une urographie intraveineuse à la recherche d’un retentissement sur les voies urinaires.
- Une rectoscopie si la clinique est évocatrice d’une atteinte rectale.
- Une échographie hépatique et pelvienne.
- Un scanner abdomino-pelvien à la recherche d’adénopathies.
- Une radiographie du thorax et du bassin, voire une IRM en fonction des résultats.
10. Appréciation de l’état général de la patiente
C’est un élément majeur du pronostic, car ce sont souvent des patientes hypertendues, diabétiques, insuffisantes coronariennes, à risque thromboembolique…
C’est dire l’importance de la consultation pré-anesthésique et de l’évaluation du risque opératoire avant de prendre une décision thérapeutique
Stratégie diagnostique:
Les méthodes disponibles sont : l’échographie pelvienne avec étude Doppler, l’hystérosonographie, la biopsie d’endomètre, la dilatation et le curetage biopsique et l’hystéroscopie. La place de ces examens dans des algorithmes diagnostiques reste controversée.
Le diagnostic histologique est indispensable car aucune technique d’imagerie ne peut différencier de façon absolue caillot sanguin, hyperplasie et cancer de l’endomètre.
1- L’echographie endovaginale:
Avec étude Doppler, est l’examen de choix pour évaluer les patientes avec hémorragies post-ménopausiques. L’échographie pelvienne a une excellente sensibilité et spécificité pour détecter une atrophie ou une hypertrophie de l’endomètre sans pour autant pouvoir affirmer avec certitude l’étiologie de cet épaississement endométrial.
Les signes échographiques du cancer de l’endomètre sont un épaississement de l’endomètre supérieur à 5 mm chez une patiente ménopausée (avec ou sans traitement hormonal substitutif) et supérieur à 15 mm chez une patiente en période d’activité génitale, un endomètre hétérogène et irrégulier avec une interface endomètre-myomètre irrégulière, la présence d’une vascularisation anarchique de l’endomètre ou de la région sous endométriale au Doppler couleur ou énergie.
Hypertrophie simple Endomètre hétérogène Hypertrophie endomètre polypoide
Endomètre irrégulier (Biopsie hyperplasie atypique) Doppler énergie + Aspect en 4D
Hypertrophie endomètre ( adénocaecinome à la biopsie) Vascularisation anormale en Doppler énergie
Sur les 4 photos ci-dessus, il agit d’une patiente de 50 ans avec une hyperplasie de l’endomètre avec atypies et adenocarcinome in situ
Un endomètre de moins de 4 mm permet quasiment d’exclure un cancer (risque < 1 % avec ou sans traitement hormonal substitutif) mais comme la spécificité est médiocre, la plupart des auteurs conseillent la biopsie si le seuil de 4 mm est atteint ou s’il y a un épaississement ou une anomalie localisée.
localisée
2- L’hysterosonographie:
Permet d’étudier la cavité utérine en réalisant une échographie pelvienne avant et après injection de sérum physiologique au sein de la cavité. Plusieurs études récentes ont objectivé une très forte sensibilité et spécificité de cet examen et une bonne concordance avec l’hystéroscopie
Certaines équipes l’utilisent en première ligne pour le diagnostic des hémorragies génitales. Facile à réaliser, bien toléré et avec peu de complications, cet examen est parfois impossible à réaliser en cas de sténose cervicale.
3- La biopsie d’endomètre:
La pipelle de Cornier est le dispositif à usage unique le plus utilisé. Une méta-analyse sur la valeur diagnostique de la biopsie par pipelle de Cornier a calculé une sensibilité de 81-99 %, une spécificité de 98 %. Les qualités diagnostiques de la pipelle de Cornier sont meilleures pour les lésions symptomatiques, chez les femmes ménopausées et pour les cancers plutôt que pour les hyperplasies atypiques . La quantité prélevée à la pipelle de Cornier serait insuffisante pour interprétation dans 5 à 15 % des cas ou impossible à obtenir à cause d’une sténose cervicale dans 8 % des cas. Ce taux d’échecs augmente avec l’âge, pouvant atteindre 17 % après 70 ans.
4- L’hystéroscopie:
Son intérêt est indéniable car elle va permettre d’avoir une vision directe de la lésion et de faire une biopsie sous contrôle de la vue.
Hyperplasie suspecte avec vaisseaux irréguliers, de calibres différents (métrorragies post-ménopausiques à 54 ans):adénocarcinome à la biopsie.
Hyperplasie atypique (taches de bougie) Hyperplasie polypoide focale Hyperplasie focale
Cancer endomètre
Bilan pré-traitement, Stadification, Facteurs pronostics:
En 1998, la FIGO a recommandé la réalisation d’une stadification chirurgicale dans le cancer de l’endomètre.
Le passage d’une stadification clinique à une stadification chirurgicale était motivé par l’imprécision de l’évaluation préopératoire, voire des informations recueillies pendant l’intervention (sous-évaluation dans 13 à 22 % des cas), et par l’absence d’évaluation ganglionnaire. La plupart des éléments de la stadification FIGO ne sont obtenus qu’après l’examen histologique définitif de la pièce opératoire.
Le traitement du cancer de l’endomètre étant souvent d’abord chirurgical, le thérapeute doit poser deux questions:
• Quels examens seront nécessaires pour définir le type de chirurgie ? Le bilan préopératoire doit permettre d’adapter le traitement chirurgical (choix de la voie d’abord, type d’hystérectomie).
• Les examens préopératoires permettent-ils de mieux préciser le niveau de stadification, voire d’éviter la stadification complète (lymphadénectomie), sachant que la stadification comprenant l’évaluation ganglionnaire devrait permettre d’identifier les patientes à risque de récidives à qui pourraient être proposés des traitements complémentaires.
- la première, de tendance américaine, réalise les curages pelviens et para-aortiques systématiquement,
- l’autre plutôt européenne préfère ne réaliser ces lymphadénectomies que dans des situations à risque de diffusion extra-utérine, ganglionnaire en particulier.
À l’aide des examens complémentaires, les situations à risque sont plus ou moins connues avant la chirurgie, seront confirmées ou modifiées par les constatations opératoires et l’examen définitif de la pièce opératoire.
L’attitude européenne, certes plus nuancée, ne se conçoit que si l’on connaît :
• le très faible risque d’atteinte ganglionnaire chez certaines patientes qui de toute façon n’auront pas de traitement adjuvant (stade IA grades 1 et 2)
• les limites, les erreurs ou plutôt les imperfections des examens préopératoires et opératoires qui prêteraient à des erreurs de
stadification.
Une hiérarchie des différents examens disponibles est proposée à partir d’études comparatives entre tomodensitométrie, échographie et IRM pour l’évaluation préthérapeutique des cancers de l’endomètre .
La profondeur d’envahissement du myomètre est un élément prédictif de métastases ganglionnaires. L’incidence des atteintes ganglionnaires passe de 3 % avec une tumeur peu envahissante (stade IB) à plus de 40 % dans les invasions profondes (stade C). L’incidence des métastases para-aortiques varie dans les mêmes proportions selon l’envahissement du myomètre (3 % stade IB à 46 % stade IC).
L’examen macroscopique peropératoire et/ou l’examen extemporané de la pièce opératoire aident à préciser l’envahissement du myomètre; cependant, l’estimation visuelle est peu précise, avec seulement une estimation juste dans 65 % des tumeurs de grade 2, de 31 % en cas de grade 3 et de 71 % en cas d’envahissement profond. L’examen extemporané est plus efficace, mais reste imprécis pour bon nombre de patientes.
L’échographie pelvienne, en adoptant strictement les critères de la FIGO, évaluent avec précision la profondeur d’envahissement du myomètre dans 60-70 % des cas. L’échographie, efficace pour le diagnostic étiologique des hémorragies post-ménopausiques en excluant un cancer de l’endomètre, est inadaptée pour visualiser l’extension des tumeurs de l’endomètre.
La TDM est précise dans 61-76 % mais cet examen, utilisé en préopératoire, ne modifierait le projet thérapeutique que dans 8 % des cas.
- Les tumeurs sont considérées de stade IA lorsque la zone jonctionnelle (ZJ) est intacte, c’est-à-dire que la lésion semble purement intra-cavitaire.
- La rupture ou la discontinuité de cette ZJ signe l’invasion du myomètre, soit un stade IB si la lésion envahit moins de 50 % du myomètre.
- Lorsque la ZJ n’est pas visible, en particulier chez les femmes ménopausées, l’injection dynamique de gadolinium prend toute sa place car une interface régulière entre l’endomètre et le myomètre est considérée comme une absence d’envahissement du myomètre.
- Dans les tumeurs de stade IC la tumeur rompt la ZJ et s’étend sur plus de 50 % du myomètre, en respectant une couche de myomètre externe.
L’IRM détermine avec justesse la profondeur d’envahissement dans 83,9 % à 92,6 % des cas .
L’IRM, dans l’évaluation du col, est précise dans 90-92 % des cas, avec une sensibilité de 75-80 % et une spécificité de 94-96 % .
L’IRM est supérieure à l’échographie et au scanner pour évaluer l’envahissement cervical, mais n’est pas capable d’identifier l’envahissement muqueux superficiel, mieux évalué par l’hystéroscopie.
Les lésions de stade III sont définies par une extension dépassant l’utérus, mais contenue dans le pelvis. En cas de stade IIIA (atteinte de la séreuse, des annexes ou cytologie péritonéale positive), la couche de myomètre la plus externe peut être rompue avec une extension directe vers les annexes .
Une extension à la partie supérieure du vagin correspond au stade IIIB.
Le stade IIIC est caractérisé par une atteinte ganglionnaire.
Le diagnostic de métastases ganglionnaires en imagerie par scanner ou par IRM est fondé sur la taille des ganglions en fixant un seuil, habituellement de 1 cm de petit axe. Mais basée sur le critère de taille, la sensibilité de l’IRM est faible pour la détection de métastases ganglionnaires. Le radiologue, en signalant une adénomégalie, ne peut que guider la lymphadénectomie.
Aucune technique d’imagerie ne permet d’identifier les micrométastases ganglionnaires qui pourraient participer à 39 % des atteintes ganglionnaires. La sensibilité de l’IRM pour la détection des métastases ganglionnaires pourrait être augmentée sans diminution de la spécificité par l’adoption de produit de contraste IRM spécifique, en particulier des particules de fer oxydé (USPIO : ultra small particles iron oxyde). L’USPIO, par sa forte valeur prédictive négative, pourrait dans certains cas éviter la lymphadénectomie. D’autres techniques IRM, comme la diffusion, sont actuellement en cours d’évaluation pour améliorer la détection de ces métastases.
Les tumeurs de stade IV s’étendent au-delà du pelvis ou envahissent le rectum ou la vessie. Dans le cas des stades IVA,l’extension à la vessie ou au rectum se visualise par la perte localisée du signal de faible intensité de la paroi rectale ou vésicale, voire même par un véritable syndrome de masse intrapariétal.
Les métastases à distance (poumon, foie, os) sont rares au moment de la découverte du cancer. Le poumon, l’organe le plus fréquemment touché, est atteint dans 2-3 % des cas.
L’enjeu du ganglion sentinelle dans le cancer de l’endomètre:
À un stade précoce du cancer de l’endomètre, la technique du ganglion sentinelle permet de détecter des micrométastases ignorées par l’histologie classique sans présenter la morbidité du curage ganglionnaire.
« C’est une très belle étape dans la compréhension du cancer de l’endomètre, dans les tumeurs I-II de la classification FIGO. Le ganglion sentinelle a toutes les chances d’améliorer la prise en charge des patientes ayant un cancer à risque faible ou intermédiaire, alors que la lymphadénectomie classique est récemment remise en cause. »
La technique apparaît comme le compromis idéal entre la lymphadénectomie systématique et l’absence de curage. Plus encore, la technique spécifique du GS, c’est-à-dire l’ultrastadification associée à l’immunohistochimie, se révèle être plus performante. Le ganglion sentinelle permet de détecter ainsi 11 à 15 % des micrométastases passées inaperçues à l’anapath traditionnelle.
« Or, la présence de micrométastases est un facteur important de récidive pelvienne et à distance, précise le spécialiste. Cet élément détermine la décision médicale concernant la nécessité d’un traitement adjuvant, radio- ou chimiothérapie. Le ganglion sentinelle donne l’information sans augmenter les risques de lymphœdème et de lymphœcèle. »
Neuf centres français participants ont inclus 133 patientes ayant un cancer de l’endomètre au stade I-II de la classification FIGO. Pour chacune des patientes, la procédure consistait à extraire le GS visualisé après injection au bleu, puis à compléter la lymphadénectomie pelvienne. Le ganglion sentinelle était analysé en coupes sériées avec immunohistochimie, les autres ganglions à l’aide de la technique traditionnelle.
La valeur prédictive négative du GS s’est révélée de 100 %, sa sensibilité de 100 %.
« Si le GS révèle une micrométastase a posteriori, il y a peu de risque pour que d’autres ganglions soient envahis, précise le chirurgien. Il n’y a donc pas d’indication à compléter le curage. Cette information va peser en revanche dans le choix du traitement adjuvant. »
À noter que si une macrométastase est détectée d’emblée à l’extemporané, la conversion vers la lymphadénectomie est réalisée dans ce cas en cours d’intervention.
Les choses bougent beaucoup dans le cancer de l’endomètre depuis quelques années. « L’INCa s’est prononcé cette année en faveur de l’abandon de la lymphadénectomie systématique dans les stades précoces.
Cancer de l’endomètre Synthèse des recommandations
ÉPIDÉMIOLOGIE
Ces recommandations pour la pratique clinique ont été élaborées en partenariat avec la Société française d’oncologie gynécologique (SFOG) en Novembre 2010.
Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), la Société française du cancer (SFC), la Société française de pathologie (SFP), la Société française de radiologie (SFR), la Société française de radiothérapie oncologique (SFRO), la Société française de médecine nucléaire (SFMN), le groupe FEDEGYN et le Regroupement des sociétés savantes de médecine générale (RSSMG) ont également pris part à ce travail notamment dans le cadre de la relecture nationale.
Le cancer de l’endomètre est le cancer gynécologique le plus fréquent en France, se situantau 5e rang des cancers chez la femme en termes d’incidence avec 6 560 nouveaux cas estimés en 20101. Ce cancer survient généralement après la ménopause.
L’âge moyen des patientes lors du diagnostic se situe à 68 ans. La survie relative à 5 ans est globalement de 76 %2. Pour un stade localisé (près de 70 % des diagnostics), elle passe à 95 %. En 2010, le nombre de décès secondaires à un cancer de l’endomètre est estimé à 1 900.
Les principaux facteurs de risque du cancer de l’endomètre sont l’obésité, le diabète et le traitement partamoxifène.
OBJECTIFS
Les objectifs des recommandations sont d’améliorer et d’homogénéiser les pratiques de prise en charge du cancer de l’endomètre.
Les recommandations portent sur l’ensemble de la prise en charge du diagnostic à la surveillance des tumeurs épithéliales de l’endomètre (cf. tableau 1) qui représentent plus de 90 %3 des cancers de l’endomètre, et qui suivent la classification histologique suivante :
- type 1 histologique : tumeurs endométrioïdes ;
- type 2 histologique : carcinomes à cellules claires, carcinomes papillaires séreux et carcinosarcomes (les autres types de sarcomes ne sont pas traités).
Evolution des prises en charge
Les attitudes ci-dessous sont aujourd’hui recommandées et représentent les principales évolutions de la prise en charge des patientes atteintes de cancer del’endomètre.
1- Bilan préthérapeutique:
Réalisation systématique d’une IRM pelvienne associée à une exploration IRM des aires ganglionnaires lomboaortiques s’appuyant sur le compte rendu réalisé par la Société française de radiologie (SFR).
2- Traitement chirurgical:
- Voie d’abord chirurgicale : utilisation privilégiée de la voie coelioscopique
pour les tumeurs limitées au corps utérin (stades I/T1) par rapport à la
laparotomie.
- Lymphadénectomie : indication restreinte pour les tumeurs limitées au corps utérin (stades I/T1) de bas risque et de risque intermédiaire.
3 -Traitements postopératoires:
- Radiothérapie externe : indication restreinte pour les tumeurs limitées au corps utérin (stades I/T1) de bas risque et de risque intermédiaire.
- Curiethérapie : utilisation préférentielle du haut débit de dose par rapport au bas débit de dose.
- Chimiothérapie : augmentation de l’inclusion des patientes dans les essais cliniques.
4- Surveillance
Absence d’indication pour des examens d’imagerie, de biologie ou des frottis vaginaux systématiques. La surveillance repose sur l’examen clinique. Ces éléments pourront être utilisés pour évaluer l’utilisation en pratique des recommandations de prise en charge du cancer de l’endomètre.
Recommandations
Les recommandations ont été formulées selon la nouvelle classification issue de la Fédération internationale de gynécologie obstétrique (FIGO) publiée en mai 2009.
1- Circonstances de découverte :
Le diagnostic de cancer de l’endomètre est suspecté devant des métrorragies, après exclusion d’une pathologie du col par un examen gynécologique.Une exploration échographique pelvienne, sus-pubienne et endovaginale est alors indiquée pour rechercher une hypertrophie endométriale. Celle-ci impose une étude histologique de l’endomètre par biopsie.
Le diagnostic anatomopathologique de malignité du cancer de l’endomètre doit précéder le bilan d’extension et la prise en charge thérapeutique.
L’analyse anatomopathologique de la biopsie permet :
* de confirmer la malignité ;
* d’identifier le type histologique :
Type 1 : tumeurs endométrioïdes pour lesquelles l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini 3 grades6
(le grade histopronostique est réalisé en fonction de l’architecture de la prolifération épithéliale maligne en excluant le contingent épidermoïde ou les morules. Lorsque les atypies cytonucléaires sont marquées, le grade est augmenté de 1) :
- grade 1 : ≤ 5 % de contingent indifférencié,
- grade 2 : 6-50 % de contingent indifférencié,
- grade 3 : > 50 % de contingent indifférencié ;
Type 2 : carcinomes à cellules claires, carcinomes papillaires/séreux et carcinosarcomes ;
* d’évaluer le grade:
L’estimation du type histologique et du grade malgré les discordances connues entre l’analyse anatomopathologique de la biopsie et l’analyse de la pièce opératoire contribue à poser l’indication d’une lymphadénectomie.
2- BILAN D EXTENSION LOCOREGIONAL:
* Examen clinique: Il comprend notamment :
-
-les antécédents personnels et familiaux
-
-la recherche du syndrome de Lynch :
- patientes présentant un cancer de l’endomètre avant 50 ans (peut être discutée entre 50 et 60 ans),
- patientes de tout âge si un apparenté au 1er degré a été atteint d’un cancer colorectal ou du spectre HNPCC :
- la recherche de facteurs de comorbidités
- un examen abdominopelvien et ganglionnaire.
* Examens d’imagerie
Le bilan d’extension locorégionale repose sur l’IRM pelvienne associée à une exploration IRM des aires ganglionnaires lomboaortiques.
La réalisation de l’IRM doit s’appuyer sur le compte rendu normalisé réalisé par la Société française de radiologie (SFR) .
L’estimation à l’IRM de l’infiltration myométriale contribue à poser l’indication d’une lymphadénectomie malgré les discordances connues entre son résultat et l’analyse de la pièce opératoire.
Le scanner abdominopelvien ne fait pas partie du bilan d’extension sauf en cas de contreindication à l’IRM. Dans ce cas, il doit être associé à l’échographie pelvienne.
En cas de suspicion de stades III/T3 et/ou N1 (FIGO 20097/TNM 20098) ou IV/T4 et/ou M1 (FIGO 20097/TNM 20098), la réalisation d’une TEP-FDG/TDM peut être discutée pour la recherche de métastases à distance.
L’imagerie thoracique (scanner thorax-abdo-pelvis) et l’exploration hépatique (par échographie ou IRM) systématiques ne font pas partie du bilan d’extension locorégionale sauf en cas de suspicion d’extension régionale (stade III/T3 et/ou N1 ((FIGO 20097/TNM 20098))
ou plus), de type 2 histologique ou de lésions identifiées par l’examen TEP-FDG/TDM.
* Examens biologiques
Le dosage du CA 125 ne fait pas partie du bilan d’extension systématique mais peut être discuté en cas de suspicion d’extension régionale (stade III/T3 et/ou N1 (FIGO 20097/TNM 20098) ou plus), d’atteinte ovarienne ou de type 2 histologique.
3- PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE:
Chirurgie
La chirurgie est le traitement de référence d’un cancer de l’endomètre tant que le stade et l’état de la patiente le permettent.
La chirurgie standard est une hystérectomie totale avec salpingo-ovariectomie bilatérale. La réalisation de gestes supplémentaires
(lymphadénectomie, omentectomie) dépend du stade clinique, du type histologique et du grade. La balance bénéfices/risques (âge, comorbidités, obésité morbide) de ces gestes supplémentaires immédiats ou différés peut y faire renoncer. Le compte rendu opératoire
doit notamment comporter la topographie exacte de la lymphadénectomie réalisée le cas échéant.
En cas d’indication d’une lymphadénectomie pelvienne, il est recommandé de réaliser un curage pelvien iliaque externe et interne complet.
En cas d’indication d’une lymphadénectomie lomboaortique, il est recommandé de réaliser un curage étendu jusqu’à la veine rénale gauche associé à une dissection des ganglions iliaques communs.
La voie d’abord recommandée pour les stades I est la voie coelioscopique ou coeliovaginale.
La voie vaginale exclusive est réservée aux patientes à très haut risque chirurgical. Lalaparotomie reste indispensable en cas de gros volume tumoral ou de conditions anatomiques particulières (échec ou contre-indication de coelioscopie, adhérence massive, etc.). Il convient d’éviter le morcellement de la pièce opératoire.
Anatomopathologie:
L’analyse anatomopathologique des pièces opératoires doit permettre d’évaluer l’infiltration du myomètre, la présence d’emboles, l’extension aux cornes, au col de l’utérus, aux annexes et le cas échéant aux ganglions, le stade et de confirmer le type histologique et le grade pour l’indication du traitement adjuvant. Le compte rendu d’anatomopathologie doit contenir les données définies conjointement par la Société française de pathologie (SFP) et l’Institut National du Cancer (INCa).
Chez toutes les patientes présentant un cancer de l’endomètre avant 50 ans (cette recherche peut se discuter entre 50 et 60 ans) ou quel que soit l’âge chez une patiente dont un apparenté au premier degré a été atteint d’un cancer colorectal ou du « spectre HNPCC » (endomètre, intestin grêle, urothélium, voies biliaires, estomac, ovaire), la recherche d’une instabilité des microsatellites au niveau tumoral est recommandée pour poser le diagnostic d’un syndrome HNPCC (Hereditary Non-Polyposis Colorectal Cancer)/Lynch.
Radiothérapie
Une irradiation de la tumeur peut être réalisée par radiothérapie externe ou curiethérapie.
- La radiothérapie externe est réalisée suivant des modalités conformationnelles et selon les recommandations du Radiation therapy oncology group (RTOG), avec des photons de très haute énergie (au moins égale à 10 MV). Le volume d’irradiation dépend de l’extension
tumorale. Elle se limite au pelvis, en l’absence d’atteinte ganglionnaire iliaque commune ou lomboaortique. En cas d’atteinte ganglionnaire lomboaortique, le volume d’irradiation inclut la région lomboaortique. La dose totale est de 45 à 50 Gy, avec 5 fractions hebdomadaires de 1,8 à 2 Gy. En cas d’irradiation exclusive, non précédée de chirurgie, une surimpression de ganglions suspects d’envahissement à l’imagerie peut être proposée jusqu’à une dose totale d’au minimum 60 Gy. Une irradiation par modulation d’intensité est actuellement en cours d’évaluation.
- La curiethérapie vaginale postopératoire est effectuée préférentiellement à haut débit de dose, évitant une hospitalisation et les complications de décubitus. Une dose de 21 à 24 Gy est délivrée en 3 séances de 7 Gy ou en 4 séances de 5 à 6 Gy, calculés à 5 mm
d’épaisseur.
En cas de curiethérapie pulsée ou à bas débit de dose, une dose de 50 Gy est délivrée, calculé à 5 mm d’épaisseur.
Lorsque la curiethérapie à haut débit de dose est effectuée en complément de la radiothérapie externe, une dose de 10 Gy est délivrée en 2 séances de 5 Gy, calculée à 5 mm d’épaisseur. En cas de curiethérapie pulsée ou à bas débit de dose, une dose de 15 Gy est délivrée, calculée à 5 mm d’épaisseur.
Certaines patientes ne sont pas opérables et ne relèvent donc pas des recommandations relatives au traitement chirurgical. Par conséquent, il leur sera proposé un traitement par radiothérapie exclusive. Une irradiation externe suivant les modalités déjà indiquées sera
suivie d’une curiethérapie utéro-vaginale de complément, réalisée suivant des modalités de bas débit de dose ou de débit pulsé. Une dose minimale totale de 15 Gy est délivrée par la curiethérapie dans un volume tenant compte de l’extension tumorale initiale. Plus rarement, une curiethérapie utéro-vaginale est réalisée suivant des modalités à haut débitde dose avec 3 à 4 séances de 7 Gy.
Chimiothérapie
En cas d’indication d’une chimiothérapie, les protocoles utilisés sont :
- L’association cisplatine (50 mg/mÇ)/doxorubicine (60 mg/mÇ) J1 est la plus étudiée mais sa toxicité hématologique fait préférer l’association carboplatine (aire sous la courbe = 5)/paclitaxel (175 mg/mÇ) J1 toutes les 3 semaines pour 4 à 6 cycles notamment
pour les patientes fragiles.
- L’association cisplatine/paclitaxel/doxorubicine n’est pas recommandée au regard de sa toxicité hématologique et neurologique.
- En cas de carcinosarcomes, les associations utilisées sont ifosfamide (5000 mg/mÇ) J1/doxorubicine (50 à 70 mg/mÇ) J1 toutes les 3 semaines ou cisplatine (20 mg/mÇ J1- J4)/ifosfamide (1500 mg/mÇ J1-J4) ou cisplatine (75 mg/mÇ)/doxorubicine (60 mg/mÇ) J1
toutes les 3 semaines. L’association cisplatine (75 mg/mÇ) J1/ifosfamide (3000 mg/mÇ) J1- J2/doxorubicine (50 mg/mÇ) J1 toutes les 3 semaines peut être discutée.
- Si une chimiothérapie adjuvante est proposée, elle doit être administrée avant ou après la radiothérapie de façon séquentielle. Si la patiente n’est pas en mesure de supporter le traitement séquentiel, la radiothérapie seule sera préférée.
Les thérapies ciblées sont en cours d’évaluation.
L’inclusion dans des essais thérapeutiques doit être privilégiée dans la mesure où il existe peu de données sur la chimiothérapie adjuvante dans le cancer de l’endomètre.
Hormonothérapie
L’hormonothérapie adjuvante n’est jamais recommandée.
En situation métastatique, elle peut être indiquée lorsque la chimiothérapie n’est pas applicable ou en cas de maladie lentement évolutive avec récepteurs hormonaux positifs.
Le traitement repose alors principalement sur l’acétate de médroxyprogestérone par voie orale à la dose de 500 mg/j. En cas de contre-indication, des anti-oestrogènes peuvent être utilisés.
Algorythmes
cancer de l’endometre rabat maroc gynecologie, chimiotherapie, radiotherapie